JORGE RODRIGUES SIMAO

ADVOCACI NASCUNT, UR JUDICES SIUNT

Un an après, l'élargissement continue d'inspirer des craintes

Un an après, l'élargissement continue d'inspirer des craintes

in LM,30.04.05

La discrétion avec laquelle ont été signés, le 25 avril à Luxembourg, les traités d'adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie en dit long sur l'état d'esprit des Européens, un an après l'élargissement le plus important de l'histoire européenne.

L'arrivée des dix Etats entrés dans l'Union le 1er mai 2004 s'est déroulée sans encombres, contribuant à réunifier sur le plan politique et économique un continent ravagé par Hitler, puis divisé par cinquante années de guerre froide. Mais elle est loin d'être totalement digérée.

Le Parlement européen débat des Roms

L'élargissement de l'Europe de l'Est et l'arrivée dans ses rangs de deux eurodéputées roms ont sensibilisé le Parlement européen au sort de cette minorité ethnique, la plus importante d'Europe (entre 7 et 9 millions de membres). Les communautés les plus nombreuses sont implantées dans trois nouveaux Etats, la Hongrie, la Slovaquie, et la République tchèque, ainsi qu'en Roumanie et Bulgarie. Le Parlement a, pour la première fois de son histoire, voté, jeudi 28 avril, une résolution qui condamne toutes les formes de discrimination dont ces communautés sont victimes. Deux Hongroises d'origine rom, élues en juin 2004 et siégeant à la droite du Parlement, sont à l'origine de ce vote, Livia Jaroka et Viktoria Mohacsi, âgées de 30 ans.

La résolution du Parlement, votée à une écrasante majorité, réclame une meilleure intégration des Roms dans l'Union, invitant leurs pays à les sortir d'une "ghettoïsation inacceptable" . Nombre de députés estiment qu'il faut tout faire pour que les Roms ne soient pas obligés de se déplacer vers l'Ouest, redoutant de nouveaux problèmes. (Corresp.)

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Les disparités demeurent grandes. Dans les mentalités, des craintes demeurent. Ce double constat incite les dirigeants européens à s'interroger sur les modalités, sinon sur l'opportunité, de la poursuite du processus d'élargissement de l'Union. L'Union à vingt-cinq a pourtant échappé aux différentes menaces mises en avant par les détracteurs de l'élargissement.

Celui-ci ne s'est accompagné d'aucune vague migratoire significative, ni dans les Etats qui avaient décidé, comme la Grande-Bretagne, l'Irlande et la Suède, d'ouvrir sans tarder leur marché du travail, ni dans ceux qui, pendant une période de transition prévue lors de la négociation d'adhésion, l'avaient seulement entrouvert. Aucune des clauses de sauvegarde inscrites dans les traités n'a été invoquée, souligne la Commission européenne.

En dépit d'un chômage persistant, la croissance des Dix est au-dessus de la moyenne européenne. Elle a été de 4,9 % en 2004, contre 3,7 % en 2003, et pourrait être encore supérieure à 4 % en 2005, soit deux fois plus que chez les Quinze. Selon l'agence Eurostat, le revenu moyen des agriculteurs a augmenté de plus de 50 %. L'activité touristique s'est aussi développée. Les Quinze ont eux-mêmes bénéficié de l'élargissement, grâce au développement du commerce et des investissements.

RÉUNIONS MOINS CONVIVIALES

Le fonctionnement des institutions européennes n'a pas été paralysé comme certains le redoutaient.

Mais les dirigeants européens reconnaissent que les discussions à vingt-cinq, au Conseil comme à la Commission, sont plus compliquées, moins conviviales. Les intérêts des dix nouveaux membres divergent souvent aussi de ceux des quinze anciens.

Réputés plus libéraux, les Dix font entendre leur différence sur des sujets sensibles. Au côté de la Grande-Bretagne, ils plaident en particulier pour la libre circulation des services. Ils entendent aussi peser sur la négociation du budget communautaire pour la période 2007-2013 afin de maintenir au niveau le plus élevé possible les fonds qui leur seront versés.

Les malentendus se sont multipliés. Alors que la croissance demeure faible en France et en Allemagne, les discussions sur la directive Bolkestein ont réveillé les craintes de dumping social.

Le débat sur les délocalisations a suscité des tensions, les nouveaux membres estimant que celle-ci peut servir leur développement, alors que les anciens s'inquiètent, à l'instar de la France, de l'absence d'harmonisation fiscale et sociale.

"La Pologne, plus pauvre -que les autres pays de l'UE-, a juste besoin que les mêmes règles du jeu soient appliquées partout" , a indiqué Marek Belka, le premier ministre polonais, lors du dernier sommet européen. Si le rattrapage économique bat son plein, les dirigeants de la zone euro appellent à la prudence, avant d'élargir l'Union monétaire.

Cette atmosphère incite les responsables européens à temporiser. Malgré les souhaits de la Pologne, ils tentent de calmer les ardeurs européennes de l'Ukraine, qui entend se rapprocher à grands pas de l'Union après la révolution orange. Tandis que les négociations d'adhésion de la Turquie doivent s'ouvrir le 3 octobre, les négociateurs européens multiplient les appels à la poursuite des réformes par Ankara. Et soulignent que les pourparlers pourraient durer entre "quinze et vingt ans" , selon Michel Barnier, le ministre français des affaires étrangères.

L'Union doit avancer "à pas mesurés" , estime le commissaire à l'élargissement, Olli Rehn. Il faudra, a-t-il dit, se concentrer davantage sur les bilans des pays candidats que sur leurs engagements, et surtout mieux communiquer avec les opinions publiques. "Toutes les prochaines mesures en matière d'élargissement doivent être prises avec l'assentiment de nos citoyens" , a-t-il affirmé.

"C'est l'ouverture vers les autres et non pas l'isolationnisme qui apporte des résultats et dynamise l'Union européenne" , a souligné le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, en écho au débat référendaire français. "En fin de compte, estime-t-il, l'Europe unie est aussi la réponse aux peurs liées au populisme, au chauvinisme, à la xénophobie, au terrorisme également et surtout à la pauvreté. Notre devoir est de montrer aux citoyens que l'Europe n'a pas de complexes."

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